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1 novembre 2009 7 01 /11 /novembre /2009 13:34
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Relâche exceptionnelle le jeudi 19 novembre


Loin des cendres retombées et pourtant encore brûlantes de Troie, l’impossible reconstruction des êtres qui s’échappent plus ils se cherchent. Les cœurs et les veines palpitent et brûlent encore des amours sanglantes d’Hélène : perversion du sens et contagion ardente  des sens… combat de la chair des rois et des dieux.


Quand l’alexandrin n’est plus un mode stylistique, mais la manifestation affolée et sensuelle de la pulsation  des cœurs à corps. Ni faux grec, ni vrai kitch ! 24h chrono : les coulisses diplomatiques du sommet d'un G2. Vie publique - Vie privée. "Point de Vue", "Images du Monde" : le dit grand et beau.


ANDROMAQUE EN PROFONDEUR
par Christian-Yves Pratoussy

AFFICHE-fond.jpg                                                                                                             Photo : Michel Béatrix

     D’ordinaire, ou en tout cas très fréquemment, pour rejoindre sa place, un spectateur de théâtre monte des marches (sans même parler de celui, peu fortuné, qui a réservé à un rang éloigné de la scène ou au poulailler). Et, d’une certaine manière, plus on monte, plus on est au théâtre, étymologiquement entendu, puisque le grec theatron (de thea : l’ « action de regarder ») se rapporte non à ce que l’on voit, mais à l’endroit d’où l’on voit : monter permettrait ainsi d’avoir le plus grand angle de vue possible sur la scène et d’avoir une meilleure perception des intentions dramaturgiques de l’équipe artistique.

 

       Chez Michel Béatrix, si ces effets de perception sont bien ceux-ci, et plus encore, c’est pour une raison absolument inverse. Chez lui, en effet, on « descend ». La dernière fois que nous l’avons vu « en surface », c’était pour une Annonce faite à Marie parfaite (dans une chapelle latérale de l’Abbaye d’Ainay). Mais on pouvait bien deviner que le niveau des hommes et des jours n’était qu’une étape sur le chemin des profondeurs. Depuis deux ans maintenant, Béatrix a en effet installé sa compagnie dans la crypte de l’église Saint-Joseph-des-Brotteaux. Depuis deux ans donc, on est ainsi notamment « descendu » voir un Dom Juan (Molière) exponentiel et un Pilate (Jean-Yves Picq) sincère.

 

       Pour l’heure, c’est Andromaque qui est « représentée ». Mais ce mot convient-il encore au travail de Michel Béatrix ? Tout comme celui de « spectacle », de « spectateur ». Cette problématique du vocabulaire n’est pas accessoire, elle est directement liée à ce qui se joue là (en terme d’enjeu et pas seulement de jeu), et a à voir avec notre préambule historique, mais pas seulement : certes, Béatrix fait œuvre anthropologique en accédant à une acception fondatrice et fondamentale du théâtre, mais il le fait d’une manière plus que moderne. Comme si, l’avenir nous le confirmera peut-être, il anticipait la pratique théâtrale des temps prochains, époque où ne seront plus que souvenirs les spectacles, au sens le plus commerciale du terme, d’aujourd’hui (et où le spectateur renoncera à ses pratiques de consommation pour privilégier des pratiques d’engagement).

 

       Qu’on s’explique enfin. En premier lieu, revenons-y, il faut descendre. Partant, nous sommes convaincu que, ne serait-ce que par le poids de notre corps terrestre, cela participe à nous installer avec densité dans notre position, mieux : notre posture de « spectateur » (par défaut contentons-nous de cette identité convenue). Ensuite, comme si le « spectacle » (à l’origine, ce qui « attire l’attention ») commençait avant l’heure : l’espace scénique, non seulement n’est pas délimité, mais il semble se confondre avec la « salle ». En fait, il n’y a pour tout dire ni scène, ni salle. Des sièges sont certes installés, formant deux espaces communiquant, mais on découvre vite que certains de ces sièges sont « réservés » aux personnages.

 

 Hermione-Oreste-web.JPG      Arrivé de bonne heure, l’auteur de ces lignes a eu le loisir de s’installer à côté… d’Hermione. L’anecdote personnelle n’est rien au regard de ce que nous avancions précédemment : le théâtre de Béatrix n’est pas seulement vision, il est aussi, presque, toucher, odeur. Parfois épaule contre épaule avec Hermione (l’éminente Céline Barbarin), interpellé personnellement – il nous plaît de le croire – par le regard d’Andromaque la majestueuse Claire Lebobe-Maxime), dans l’espoir de sympathiser avec Cléone (la pétillante Françoise Jardel), au plus près de la folie d’Oreste (l’extrême Hervé Tharel), sentiments (l’intellectuel) et sensations (le corporel) participent à ce qui serait, si l’on nous autorise l’expression, une « mise en abysse » (en référence risquée à la « mise en abîme », le fameux « théâtre dans le théâtre » à la mode d’Hamlet).

 

       Pour autant, il faut se défaire de l’idée que la mise en scène d’Andromaque tient par ce seul vecteur de proximité entre acteurs et spectateurs. Parce que, au final, c’est peut-être avec Michel Béatrix (et il en sera peut-être le premier surpris s’il lit ces lignes) que nous avons mieux compris ce que voulait dire Brecht avec son Verfremdungseffekt, l’ « effet de distanciation » : ici, être au plus près de la scène nous en rend plus étranger. Et s’il y a théâtre (theatron), c’est un regard sur nous-mêmes (avec chacun notre part d’Andromaque, d’Hermione, de Pyrrhus, d’Oreste), regard nécessairement profond si l’on veut y voir clair.

Christian-Yves Pratoussy

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